Des travailleurs haïtiens victimes d’une entreprise dominicaine de noix de coco, Coquera Real, campent depuis plus d’un mois devant le siège du Ministère dominicain du Travail pour réclamer leurs prestations laborales. Ils sont pris entre le rejet et l’indifférence des autorités dominicaines et haïtiennes. L’entreprise Coquera Real a déclaré faillite alors que le Ministère du Travail, à l’encontre des dispositions légales en la matière, n’a jamais procédé à une quelconque inspection ni entamé des procédures pour garantir les contrats des travailleurs. Le montant de leurs prestations laborales serait de 15 millions de pesos. Chaque semaine, le dossier fait les grands titres de la presse dominicaine où abondent les interventions de différentes instances étatiques qui rejettent l’action des travailleurs haïtiens à l’instar du Ministère du Travail qui renvoie l’affaire à la justice. Parallèlement, le gouvernement Martelly-Lamothe reste quasiment silencieux dans ce dossier qui touche aux intérêts et droits de plus d’une centaine de ressortissants haïtiens. L’opinion publique en Haïti attend encore un communiqué de nature à l’éclairer sur la position du gouvernement et les démarches entreprises pour venir en aide à ces Haïtiens/Haïtiennes dont les droits du travail ont été bafoués. Ce manque d’intérêt des autorités leur a valu ces propos de la ministre du Travail, Maritza Hernandez rapportés par l’agence en ligne HOY, le 17 janvier 2013 : «L’ambassade d’Haiti a abandonné les Haïtiens qui campent devant le siège du Ministère du Travail en réclamation de leurs prestations laborales», aurait déclaré la ministre, ajoutant que «c’est préoccupant qu’un citoyen puisse se trouver dans ces conditions et que son ambassade s’en moque» (Hoy,17/1/13) Cependant, les autorités de Santo Domingo ont essuyé à leur tour, les critiques de l’ex ministre dominicain du Travail, Max Puig, en désaccord avec cette position à la Ponce Pilate. Le Ministère du Travail ne doit pas s’en laver les mains et renvoyer à d’autres le travail qu’il n’a pas fait, estime Max Puig. L’ex-fonctionnaire s’est dit surpris par les déclarations des autorités du travail selon lesquelles l’affaire relève exclusivement de la justice. « Les ouvriers ont travaillé pendant dix ans dans une entreprise sans registre légal. Où donc étaient les inspecteurs du Travail et les inspecteurs de la Migration, où était donc la Police Nationale ? s’est-il interrogé. « Aujourd’hui, c’est inadmissible que le Ministère du Travail déclare qu’il n’a pas la compétence et que personne dans le gouvernement n’a la compétence en la matière», a condamné l’ex-titulaire du Ministère du Travail dominicain. (ESPACINSULAR, 15/1/13) Entre temps, avec leurs maigres effets entassés autour d’eux, les travailleurs haïtiens et leurs enfants dorment à même le sol depuis 4 semaines sur les trottoirs de cette institution étatique et se réveillent dans l’anxiété d’être déportés-es les mains vides vers Haïti. Il arrive que des passants dominicains sympathiques à leur cause les approvisionnent. Pris entre le laxisme du gouvernement Martelly-Lamothe et la mauvaise foi jointe à la violence institutionnalisée des autorités dominicaines, les travailleurs haïtiens veulent encore résister et disent qu’ils n’abandonneront leur mouvement qu’après avoir reçu ce qui leur est du. Le 16 janvier 2013, les responsables dominicains ont décidé d’aggraver leur peine et les démobiliser en arrêtant une dizaine d’entre eux partis faire des courses dans le quartier avoisinant le Ministère. (El Nacional, 16/1/13) Début janvier 2013, le dirigeant de la Fondation Zile à Santo Domingo, M. Edwin Paraison, ex-ministre des Haïtiens Vivant à l’Etranger, avait appelé la Direction de la Migration à surseoir à toute déportation de ces travailleurs qui ne font que réclamer une solution dans un conflit les opposant à une entreprise spoliatrice de leurs droits. En dernière heure, la presse dominicaine rapporte que le Directeur Général de la Migration a lancé un appel à la titulaire du Ministère du Travail pour réclamer l’intervention de la Police en vue de déguerpir de force ces travailleurs haïtiens. (El Nacional, 17/1/13) Le GARR saisit l’occasion pour exhorter les autorités des deux pays à trouver une solution dans ce conflit qui a déjà trop duré en garantissant aux travailleurs leurs prestations laborales et la protection que nécessite leur cas.