MIAMI, 19 Juillet - Gouvènman an lakay ou est une sorte de journée portes ouvertes ou town-meeting, organisé par l’actuel gouvernement haïtien, et dont la 9ème édition vient de se tenir à Miami, dans les locaux du North Miami Senior High School, en présence d’une foule considérable. En effet, les haïtiano-floridiens ont répondu en nombre à l’invitation du Consulat général d’Haïti à Miami, environ un millier de personnes dans la salle de conférence, et une cinquantaine d’autres à l’extérieur cherchant à entrer, mais les portes sont restées closes, par mesure de sécurité. Cependant tout le monde finira par s’y faufiler au fur et à mesure. Sur le podium le Premier ministre Laurent Lamothe, entouré des ministres Stéphanie Balmir Villedrouin (Tourisme), Nesmy Manigat (Education Nationale), Jean Renel Sanon (Justice), Rudy Herivaux, (Communication), Wilson Laleau (Commerce), François Guillaume (Haïtiens vivant à l’étranger). Il y avait aussi Godson Orélus (Chef de la Police nationale), et le Directeur général de l’UCLBC (construction des édifices publics). Etaient invités aussi des Officiels du Haitian American Chamber of Commerce, tout le monde en T-shirt ‘rose’, couleur du régime Martelly (Michel Martelly, président élu de la République). Un invité inattendu, oui parce que le Président Michel Martelly n’est habituellement pas au programme à Gouvènman lakay ou . Mais il arriva par surprise pour présenter ses respects, faire un survol des principales réalisations du gouvernement, et indiquer que Haïti est redevenue aujourd’hui un centre d’intérêts, ‘the place to be’. Puis le Président se retira pour laisser la rencontre se dérouler. D’emblée le Premier ministre ouvre la séance. Il y avait dans chaque exposé deux parties bien distinctes: la présentation par le ministre en charge des projets accomplis, suivie des questions des membres de l’assistance. Une place très importante a été accordée au Ministre de l’Education Nationale qui a pu longuement s’étendre sur le PSUGO ou Programme de Scolarisation Universelle Gratuite et Obligatoire. Des chiffres sont cités. Chaque mois, le ministère reçoit du CONATEL (organisme gérant les télécommunications) et de la Banque centrale (BRH) : 3 millions de dollars représentant la contribution des Haïtiens de la diaspora. En effet, ces fonds proviennent des taxes perçues sur les transferts vers Haïti, mais également sur les appels téléphoniques en direction d’Haïti depuis les compatriotes vivant à l’extérieur. Mais le programme coûte bien davantage. 55 millions de dollars par an (35 venant de la diaspora et 20 Millions du trésor public). Quant aux taxes versées par les Haïtiens vivant en Haïti, elles représentent une contribution de 2 millions de dollars par mois. Au total, un million quatre cent mille enfants bénéficient du PSUGO. Le taux de scolarisation en Haïti passant de 50 % à 88 %. « Notre objectif, c’est d’arriver à 100 pour cent de fréquentation dans les écoles. Il faut que tous les enfants d’Haïti puissent aller à l’école », s’est exclamé le Ministre Nesmy Manigat. La première question a été posée par un journaliste haïtien de West Palm Beach qui, dans un charabia incroyable, n’est pas arrivé à se faire comprendre. Puis vint l’ex-vedette de la radio en Haïti, Bob Lemoine, salué avec beaucoup d’amitié par le Premier ministre. Bob n’avait pas réellement de question. Il voulait surtout présenter ses félicitations à l’équipe au pouvoir pour le travail accompli. “ Savez-vous que les ¾ des Haïtiens en diaspora ne savent rien de tout ce que vous venez de dire ! “… Bob est suivi d’une enseignante surnommée ‘Teacher’ Carline : “Eske pofesè kap anseye ti moun sa yo jwenn posiblité pou yo resikle pou edikasyon ya p bay ti moun yo vreman adapte a poblèm ti moun sa yo ?” Carline dit que les professeurs de la diaspora ne savent par où passer pour participer aussi au programme. Une question un peu dérangeante pour le titulaire de la Justice, Jean Renel Sanon. Posée par une petite fille à la voix fluette. « Est-ce que quelqu’un peut passer 13 MOIS en prison, sans être présentée devant un juge » (c’est la fameuse détention préventive prolongée si courante mais aussi dénoncée chez nous). La fillette parle de sa mère qui est en prison depuis plus d’une année en Haïti. Malgré de grosses sommes déboursées, l’affaire n’a jamais pu être réglée, poursuit-elle les larmes aux yeux ! Le Ministre de la justice bredouille: “Non, quelqu’un ne peut pas passer 13 mois en prison sans avoir vu un juge. On n’a pas le droit de garder votre maman en prison sans que l’on ait entendu parler d’elle. “ Etc. Le Premier ministre demande au ministre de passer des coups de fil dans l’immédiat pour pouvoir régler l’affaire. Il promet à la petite fille que d’ici la fin de la rencontre, elle sera fixée sur le sort de sa maman. On passa à une autre question : Justement les conditions dans les prisons haïtiennes sont déplorables. Trop de gens dans les prisons. Le gouvernement a-t-il un programme pour la construction d’autres prisons? Le Ministre répond en demandant à celui qui a posé la question s’il sait combien coûte une prison ? Puis l’on passa au Directeur général de la Direction Générale des Impôts (DGI) … Et là, ce fut une pluie de questions, entre autres à propos de propriétés qui leur auraient été dérobées par des gens vivant en Haïti, et qu’ils n’arrivent pas à récupérer. Idem le Directeur général de la Douane, d’être mis lui aussi sur la sellette. Le dédouanement de biens envoyés au pays se révélant un casse-tête. Raymond Elie enchaine avec une question: en 1983, le gouvernement haïtien a supprimé la facture consulaire, ce qui lui permettait de contrôler les prix de tous les produits qui entraient au pays. 31 années plus tard, le gouvernement n’a toujours pas su trouver une solution. Alors pourquoi ne pas rétablir la facture consulaire, ce qui d’ailleurs créerait des dizaines d’emplois ? Sur ce, une question insolite : J’ai envoyé une grosse voiture en Haïti et j’ai mis un petit truck à l’intérieur de la grosse voiture. La compagnie de transport n’a pas envoyé les papiers de la petite voiture. On a tout saisi en douane en Haïti: la grosse comme la petite voiture. Alors que j’avais les papiers corrects pour la grosse voiture. Autre question: « Mwen se moun Grand Boukan, nan Nippes. Nou te kotize et nou voye yon jeneratris 4.000 dola, 2 transfòmatè pou bay kouran nan komin lan. Il nous faut des fils et des poteaux pour que le projet devienne réalité. » A ce moment, Lamothe demande au Consul d’Haïti de dégager une salle à côté pour recueillir les doléances qui commençaient par leur nombre à dépasser toutes les attentes. Et le Premier ministre d’annoncer qu’une structure spéciale va être créée pour recevoir toutes les griefs de la diaspora. Puis on fit le point sur certaines questions importantes comme celles posées au numéro 1 de la DGI. Des gens de la diaspora perdent leurs propriétés, parce que n’étant pas sur place, quand des gens malhonnêtes s’y installent. Et quand ils demandent à un avocat de régler la question, souvent ils se font gruger. L’avocat leur demande des milliers de dollars, les papiers de la terre et disparait sans laisser de trace. Comme cela n’en finissait pas sur cette question, Laurent Lamothe a recommandé la formation d’une commission de suivi pour poursuivre les démarches. Cette commission comprend entre autres : Gepsie Metellus de l’organisation Sant-La, Jean Robert Lafortune du Haitian American Grass Roots Coalition. Viola Pierre, Pierre Alcindor, Alex St Surin. La présentation de la Ministre du Tourisme a été plutôt reposante après celles qui l’ont précédé ! Le nombre de touristes venant en Haïti a augmenté de 20 % et la plupart de ces touristes sont des DIASPORA (!). Cela a pu être obtenu grâce aux aménagements apportés dans divers sites. A parti d’Octobre, American Airlines va atterrir aussi à l’aéroport international du Cap Haïtien, annonce la ministre Stéphanie Balmir Villedrouin. Elle passa en revue des aménagements réalisés dans la zone NORD : le Parc de la Citadelle où un million de dollars ont été investis, avec Centre d’accueil à Choiseul, Coffee shop, un centre d’artisanat. Aménagement d’un Musée d’Artillerie à la Citadelle Christophe. Reconstruction du marché artisanal du Cap Haïtien. Débarcadère à la Baie de l’Acul. Observatoire de Boutilliers. Réhabilitation de Fort Jacques. Ouanaminthe, bureau d’information touristique. Puis dans d’autres parties du pays : Aménagement de Saut d’Eau ; Village de Noailles, installation de lampadaires solaires. Sans omettre l’accueil désormais à l’Aéroport Toussaint Louverture. Pour JACMEL, Boulevard touristique Pétion Bolivar ; Centre de Convention … L’assistance était muette d’admiration ! Au chapitre de la Reconstruction, l’ingénieur Harry ADAM, directeur général de la UCLBP, s’étend sur la réhabilitation des quartiers et sur les unités de logements construits pour accueillir les déplacés du séisme de janvier 2010. Et ça défile : JALOUSIE, St Martin dans Carrefour Feuilles, Croix des bouquets, Village Lumane Casimir ; Bowenfield 2.000 logements. Dans le Sud, 500 logements pour les gens de l’île-à-Vâches. … Après ce dialogue de plusieurs heures, il revint au PM de conclure avec un résumé des diverses présentations. La Douane annonce la création d’un bureau de doléances ‘only’ pour la diaspora. Toutes les organisations ayant fait le déplacement reçoivent des remerciements appuyés. La 9ème édition de Gouvènman an lakay ou s’est terminée à Miami, le samedi 19 Juillet 2014, avec des prix offerts à 26 Organisations. Il était 8h45 pm. Le tout avait duré plus de 4 heures d’horloge. Elsie Ethéart, Haïti en Marche / Miami