Des instruments pour les musiciens de l’INAMUH de Jacmel

Et le poète Mégie ‘Togiram’ honoré

Jacmel, Samedi 15 octobre 2016 - Cérémonie de remise de dons par l’ambassadeur du Venezuela en Haïti doublée d’une autre cérémonie pour honorer un maître de la langue créole, le poète Emile Célestin Mégie, “Togiram”, qui ce 17 octobre aura 95 ans. Et surtout qui se bat depuis 28 ans pour faire du créole une langue comme toutes les autres, acceptée dans les écoles, aux examens du Baccalauréat et une langue officielle de notre pays.

 

Hommage à Hugo Chavez ...

10 heures du matin, c’est l’ouverture de la cérémonie avec Fritz Valesco, le fondateur de l’Ecole de Musique Dessex Baptiste.

‘Pitit Fèy’ commence en retraçant l’histoire des relations entre le Venezuela et l’Ecole de musique de Jacmel, passant par le président décédé Hugo Chavez qui, tout de suite, avait compris l’importance de cette école pour la ville de Jacmel, chère à son coeur, puisque Simon Bolivar, le Libérateur de l’Amérique latine, a vécu dans cette ville où a été créé le drapeau de la république libre du Venezuela.

Le premier don du président Chavez a été un lot d’instruments de musique qui, jusqu’à ce jour, servent encore aux étudiants-musiciens. Une centaine d’enfants ont pu être acceptés cette année à l’Ecole et il faut des instruments pour eux.

Les voici ces instruments bien emballés dans plusieurs boites arrivés à bord d’un conteneur et d’un autobus flambant neuf, ce dernier don aussi du Venezuela.

 

Vingt deux fanfares/écoles de musique ...

L’Ambassadeur du Venezuela en Haïti, Luis Ernesto Diaz Curbello, est heureux d’offrir ce magistral cadeau à l’Ecole de Musique Dessex Baptiste pour le compte de l’INAMUH, l’Institut National de Musique d’Haïti, qui regroupe 22 fanfares/écoles de musique réparties à travers le pays. ‘Donner à un enfant de 8, 10 ans une trompette, c’est lui enlever des mains un revolver”, dit Fritz Valesco. L’assistance applaudit à ces propos.

Jacmel n’est pas la seule école bénéficiant du concours du Venezuela. La première a été l’Ecole de Musique de Hinche, sous la houlette du dévoué Frère Armand.  Quatre autres écoles ont suivi, commençant à constituer la chaîne de l’INAMUH.

INAMUH ? La première fois que j’en ai entendu parler, raconte le Ministre de la Culture, Marc Aurèle Garcia, j’ai pensé que c’était un nom indien. Mais le Directeur Général du ministère de la Culture, Jean Michel Lapin, m’a expliqué que c’était peut être indien mais sûrement aussi haïtien. Tout a commencé, raconte ce dernier, avec le président René Préval qui a demandé à son ministre de la culture de l’époque, Daniel Elie, de tout faire pour assurer la formation musicale des jeunes dans le pays. Il faut dire que René Préval est un grand amateur de trompette, instrument qu’il joue à ses moments de loisir.

 

La petite histoire de l’INAMUH ...

Lapin évoque aussi la rencontre du président Michel Martelly avec Hugo Chavez. A Caracas, un orchestre composé en majeure partie d’enfants anime la rencontre des deux chefs d’état. C’est merveilleux. Martelly y prend goût … musicien lui même. Hugo Chavez consent à aider à implanter en Haïti ce genre d’orchestre. La première école sera fondée à Hinche, au centre des Petits frères et Petites soeurs de l’Încarnation. Cette première INAMUH reçoit en cadeau des instruments du Venezuela, tandis que deux professionnels haïtiens viennent y prêter leur concours : Raoul Denis Jr. et sa soeur Pascale, tous deux pianistes, comme leur mère Micheline Laudun Denis.

Petit à petit d’autres segments sont intégrés à ce projet d’Institut National de Musique d’Haïti. Après Hinche citons Jacmel, les Cayes, Port-au-Prince ...

Des bourses sont également octroyées à de jeunes musiciens particulièrement doués, comme ce jeune élève de l’Ecole de Musique Dessex Baptiste, parti se spécialiser à Strasbourg, en conduction d’orchestre, aux frais de la ville de Strasbourg.

Deux violonistes sont actuellement au Mexique, aux frais de ce pays. Le directeur général du Ministère de la Culture et de la Communication, Jean Michel Lapin, est intarissable quand il aborde le sujet. C’est que lui aussi est de Jacmel et on le sent fier de participer à ce vaste projet.

Le Ministère de la culture présentement soutient quatre de ces écoles dans le cadre de l’INAMUH. Et il en reste une douzaine à mettre sur pied. “C’est un peu lourd pour nous, signale le DG Lapin”.

Les Intervenants se succèdent. Puis c’est la pause café. Dans l’assistance on remarque Mme Michaëlle Craan, la mère ou grand mère des artistes de Jacmel, qui fête son anniversaire de naissance ce 15 octobre.

 

Honneur et gloire au poète TOGIRAM ...

Mais l’invité d’honneur est Emile Célestin Mégie, poète de Marigot, dit TOGIRAM, anagramme pour Marigot.

Notre ancien collaborateur à Haïti en Marche a publié 150 livres, rappelle le Directeur Départemental du Ministère de la Culture dans le Sud Est, Michelet Divers. Il raconte Mégie qui ‘ferraille”, dit-il, depuis 78 ans pour la promotion littéraire de la langue créole.

Le Ministre de la Culture, Marc Aurèle Garcia, invité à prendre la parole, présente Togiram comme le poète créole haïtien le plus pur. Et ironiquement aussi, le moins intéressé par les honneurs.

Emile Célestin Mégie qui reçoit une plaque du Ministère de la culture pour sa contribution immense à la langue créole, a beaucoup de cordes à son arc. Ses écrits se retrouvent dans le Petit Samedi Soir de Dieudonné Fardin (années 1970), dans Haïti en Marche (années 1980-1990), dans Le Nouvelliste. Etc.

Peu de gens écrivaient le créole à ce niveau, il y a de cela 50 ans. En effet Mégie n’est pas facile. Pour lui l’orthographe du créole est quelque chose de sacré. Et il n’hésite pas à donner sa démission quand on lui demande de traduire la Constitution en créole et qu’il n’est pas d’accord avec le reste du groupe.

Une polémique a surgi, à savoir : qui a écrit le Premier Roman Créole? Mégie (alias Togiram) affirme que le premier vrai roman créole est “Lanmou pa gen baryè”, de lui-même. Il parle d’une voix bien ferme pour ses 94 ans. Son dernier roman ne date pas de bien longtemps. Il s’agit des Lettres de Marigot, dont la sortie a été assurée par le Ministère de la Culture, annonce le Directeur général du ministère, Jean Michel Lapin. Ce que notre auteur reçoit comme le plus gros cadeau à l’occasion de son anniversaire.

Cette véritable fête de la culture s’est terminée par la remise des instruments de musique au Directeur de l’Ecole de Musique Dessex Baptiste, Fritz Valesco.

L’assistance est invitée à descendre devant le bâtiment où sont stationnés un container et un autobus, dont la clé a été remise par le Ministre de la culture à Mr. Valesco.

Devant le bâtiment de l’école des caisses sont ouvertes. Elles contiennent des instruments flambant neufs pour les jeunes musiciens de l’INAMUH de Jacmel. L’ambassadeur du Venezuela en Haïti ne cache pas sa satisfaction. Une fois encore, le Venezuela fait des heureux en Haïti.

Tandis que ‘Pitit fèy’ vient de marquer un autre pas dans son entreprise d’enlever des rues le plus possible d’enfants, comme le voulait Dessex Baptiste, en leur donnant une raison de vivre : LA MUSIQUE !

 Elsie (Haïti en Marche)