On ne le verra plus marcher de ce pas posé, sourire et raconter toutes ses histoires du temps passé où il aimait tellement se replonger, l’époque actuelle, notre  époque poque lui paraissant plutôt étrange et souvent même incompréhensible .

 

Beaucoup de choses de cete époque actuelle le choquait. La façon de s’exprimer des jeunes d’aujourd’hui , le manque de culture de cette jeune génération qui pourtant pensait tout savoir. Beaucoup de choses oui le choquaient . Mais il ne le laissait pas paraitre, gardant pour lui même et ses amis intimes tout ce avec quoi il n’était pas d’accord.

 

Le Grand Gérard qui fêtait le 22 Mai 2016 son centième anniversaire de naissance est parti dans son sommeil au cours de la nuit du jeudi 19 au vendredi 20 Janvier dernier, après une ultime conversation avec sa fille Poupette qui lui aura ainsi donné la permission de s’en aller sa mission bien accomplie.

“ Papa tu peux partir. Il est temps que tu ailles retrouver maman. Je peux maintenant me débrouiller toute seule” lui aura t-elle glissé, ce à quoi il n’a rien répondu, se contentant de lui jeter un regard encore plus tendre que d’habitude

 

C’est toute une famille qui est aujourd’hui dans la tristesse

Gérard est parti sur la pointe des pieds, comme si il n’aurait pas voulu donner du tracas.

Sa mort laisse un grand vide, car le fait de le savoir là avec la possibilité de l’avoir au bout du fil quand on avait une question à lui poser, soit sur l’armée, soir sur la medicine, soit sur la musique pour ne citer que ces diverses catégories vous plonge dans un certain désarroi.

Et qui va maintenant nous dire comment s’était passé les choses, il y a de cela 20, 30  ou 40 ans? Nous allons devoir nous débrouiller tous seuls. Fouiller notre mémoire, consulter l’internet.

Car la référence s’en est allée !

 

Gérard aura vécu très longtemps, en gardant jusqu’à la fin toute sa lucidité. Né le 22 Mai 1916, il aura écrit son dernier livre à l’âge de 95 ans. Ce fut ” Le dernier cahier sorti en 2015.  Sa fille Paula y aura joué un grand rôle, effectuant certaines recherches pour son père, tout en sachant rester discrète, selon son habitude. Quand Bernard eut à dire à Gérard  qu’il n’aimait  pas ce titre Le Dernier Cahier , voulant dire par là qu’il ne fallait pas  annoncer qu’on allait s’arrêter, Gérard  a eu un petit sourire, et lui a répondu: Mais tu ne connais pas mon âge !

Le dernier Cahier a été précédé de Memini, un livre écrit de main de maître. Quel style, quelle vivacité.

L’auteur nous raconte St Louis de Gonzague.

“C'était l'époque où Port-au-Prince n'offrait que 3 écoles primo-secondaires, uniquement à la gent masculine: Le Collège St-Martial ou le Petit Séminaire, Saint-Louis de Gonzague et le Lycée Pétion. Elles étaient coiffées, par le grand public, d'une réputation indéracinable. Le Petit Séminaire était l'école des Belles-Lettres, Saint-Louis de Gonzague était celle des mathématiciens, et le vieux Lycée se singularisait par son laïcisme, illustré par la génération de LA RONDE. –

De mes huit ans passées à l'Institution affluent "plus de souvenirs que si j'avais mille ans". En faisant un tri, je vois se profiler quelques personnalités qui furent les piliers de cette institution.

Mais Memini nous raconte aussi L’Armée d’Haïti, la politique haïtienne, la vie de famille.

On y lit que Gérard est né au Cap  et que sa famille a connu toute une pléiade de médecins: son grand père, son père, lui et deux de ses petits fils… Tous auront été ou sont médecns ( pour les plus jeunes !)

Gérard aimait en parler, non sans une certaine fierté.

 

Médecin il l’aura été jusqu’au plus profond de lui même. Dermatologue de spécialisation, iI aura été l’un des grand spécialistes de la lèpre en Haïti. .

Il s’est plongé corps et âme dans ses recherches et son nom restera lié pour toujours à cette maladie, même si au fil des années, certains  l’auront oublié.

Mais Gérard Boyer n’en a pas fait un drame. Il l’aura tout simplement noté, avant de tourner la page pour s’occuper d’autres choses.

Sa musique par exemple.

Grand mélomane il avait une grande collection de disques classiques et quand il s’enfermait dans son bureau, avec sa collection, personne ne pouvait venir le déranger .

 

Médecin avant tout, sa Clinique au Centre Médical de Port-au-Prince ne désemplissait pas. Il y recevait les adolescents souffrant d’acné, mais aussi ceux qui souffraient d’une maladie quelconque de la peau . Pour les questions de dermatologie Gérard est resté jusqu’au bout la référence. Et quand sous le poids des ans il ne descendait plus chaque jour à sa Clinique, il avait quant même conservé le mercredi où il descendait de sa maison de Fermathe pour donner un coup de main à son petit fils. Je n’ai jamais entendu Gérard se plaindre, meme pas quand, après le tremblement de terre du 12 Janvier, sa maison terriblement endommagée, il a du se séparer de sa musique, de sa bibliothèque pour aller vivre avec son fils et sa fille à Fermathe.  Il ne savait pas ce qu’était que de s’apitoyer sur son sort …

Quand on est tellement ocupé on n’a pas de temps … pour ce genre de choses.

 

Gérard a toujours été au service des autres.

Je puis en témoigner, Gérard étant resté jusqu’au bout l’ami de mes parents. Ma mere d’abord qu’ il soigna jusqu’à la fin pour ses escarres et mon père, son ami de toujours, le Dr Léon Colon à qui il rendait visite au moins deux fois par semaines pour s’entretenir avec lui de tout et de rien, mais surtout des choses du temps pasés, comme ces vieux messieurs jetaient un regard de dédain sur notre époque qui ne les interessait pas outré mesure

Evidemment la politique mise à part . Là dessus ils devenaient intarissables  , commentant les moindres faits meme si on décelait une note de dédain chez eux

 

C’est tout ça Gérard Boyer, le Grand Gérard comme aimait à l’appeler, ses enfants Victor et Paula, ses petits enfants, et ses arrières petits enfants.

Quand on avécu tellement longemps on en a des choses à leur raconter.

D’ailleurs sa famille qui a voulu lui rendre un hommage special l’an dernier, le 22 Mai 2016 pour ses 100 ans avait réuni tous ceux qui l’aimaient à Anse à Pirogue où chacun de ses petits enfants a voului raconter ce que représentait le Grand Gérard pour eux. Le Grand Gérard qui d’ailleurs a lui aussi pris la parole ému comme l’était chacun de nous en ce jour du dernier anniversaire .

 

Et c’est cet homme, ce père aimant, ce grand père , ce grand ami qui est parti dans la nuit du 19 au 20 Janvier dernier

 

Le Grand Gérard, tu es parti. Nous ne t’oublieront jamais.

Tu es parti mais sois assuré que ta mission tu l’as menée jusqu’au bout.Tu peux maintenant aller te reposer !